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« Avec le froid qui s’annonce ce n’est pas toujours facile de mettre les mains dans l’eau froide. Or si tu ne gagnes rien, alors tu ne manges rien ! » dixit Araba, une laveuse de lessive d’une trentaine d’année.
Les aides ménagères sont des filles employées chez nous au Mali afin d’assister les familles dans les tâches ménagères, la cuisine, l’entretien des enfants et les petits commerces de maison (vente de sachets d’eau, de jus divers etc..).
Ces filles qui nous viennent de nos villages éloignés à l’intérieur du Mali sont souvent âgées de dix ans et plus, et travaillent pour un montant allant de 7500FCFA à 25 000FCFA pour le secteur informel et de 30 000Fcfa à plus pour le secteur formel. Alors que le Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG) est de 40 000 Fcfa par mois au Mali.
Selon l’Article L.95 de la Loi no 92-020 du 23 septembre 1992 portant code du Travail du Mali, qui dit que : « A conditions égales de travail, de qualification professionnelle et de rendement, le salaire est égal pour tous les travailleurs, quels que soient leur origine, leur sexe, leur âge et leur statut. »
A en croire les réalités du terrain, cet article ne semble pas s’appliquer aux aides ménagères du Mali. D’ailleurs, il n’existe toujours pas, une loi et/ou un décret spécifique qui prennent en charge le statut des aides ménagères au Mali.
Dans des pays développés comme la France, les professions sont bien catégorisées. Ainsi, le ménage concerne : le nettoyage, le repassage, l’organisation des chambres et des espaces communs, etc... Cependant les tâches telles que le babysitting (Nounou) ou encore la cuisine ne font pas parti du ménage et donc des tâches de l’aide ménagère.
Les raisons pour lesquelles elles affluent à Bamako sont diverses. Elles viennent pour chercher un peu d’argent afin de venir en aide à leurs parents ou pour chercher de quoi constituer leur trousseau de mariage. Ces jeunes filles dont les droits sont bafoués, sont souvent marginalisées, voir dans certains cas violentées et même violées dans certaines familles.
Nous avons tendu notre micro à Sali une jeune fille d’une quinzaine d’années.
Sali : « A mon arrivé à Bamako, j’ai été confiée à mon oncle au quartier de Lafiabougou qui m’a placé chez une dame derrière le fleuve. Après quelques jours chez la dame qui me donnait à manger que les restes de nourriture, j’ai demandé à rentrer chez mon oncle. La dame de mauvaise foi me donna donc quelques pièces pour les quelques jours de travail que j’avais passé chez elle et m’expliqua comment me rendre sur l’autre rive. C’est ainsi que je me suis retrouvée perdue au "Rail da" en ville. Une dame m a conduit ainsi dans une radio de proximité pour passer un communiqué de recherche. Alors une autre dame est venue me chercher là-bas disant avoir entendu le communiqué. Elle dit habiter dans un village voisin du mien. Cette dame me pris ainsi sous sa coupe et c’est cette dernière qui me remis à ma patronne actuelle Mme Maïga.
Mme Maïga me donnait chaque mois mon salaire pour que j’aille le confié à la dame qui était devenu ma tutrice. Celle a qui j’avais placé ma confiance que je pensais être ma sauveuse me trahit également. Elle a dépensé tous les mois de salaire que je lui avais confié depuis que je travaillais chez madame Maiga. A peu près deux ans.
Ce n’est que dernièrement, quand j’ai voulu rentrer au village que je me suis rendu compte elle n’était plus en possession de mon argent.
C’est ainsi que Mme Maiga sensible à mon cas, s’est mise en quête de mon oncle perdu. A l’aide de la police et des personnes de bonne volonté, ce dernier fut retrouvé. Il m’expliqua, qu’il me recherchait partout où il pouvait mais que personne ne savait où j’étais. Et surtout il était très inquiet d’annoncer la nouvelle de ma disparition à sa sœur. C’est ainsi que Mme Maïga et mon oncle se sont mis d’accord pour préparer mon retour au village.
Mon oncle avec beaucoup de persévérance a réussi à récupérer les sous que la dame avait escroqués.
Je suis partie ainsi au village accompagner de mon oncle où je fis juste deux semaines pour revenir reprendre mon travail chez ma patronne qui est comme une seconde mère pour moi. »
Deuxième cas aussi émouvant que celui précédent, c’est l’histoire de Araba âgée d’une trentaine d’années aujourd’hui et faisant la lessive contre de l’argent.
Araba : « je suis à Bamako depuis plus de quinze ans. A mon arrivée j’avais treize ans et je faisais du baby-sitting chez une dame à Faladiè. L’enfant de la dame s’est tellement attaché à moi que je faisais comme partie de la famille. Ma patronne me traitait bien et je ne manquais de rien. Après trois années passées dans cette famille, je retournai au village et je me retrouvai face à un plan de mariage dont la date était déjà fixée. Je m’enfuis donc pour Bamako, mais je ne pouvais plus retourner à Faladiè où jetais connue. Je me retrouvai dans un quartier nommé N’Tomikorobougou.
C’est là que ma galère commença !
La situation par rapport à celle de chez mon ancienne patronne n’était pas du tout pareille. Je vivais désormais dans une grande famille et nous étions plusieurs aides ménagères. Je me laissais donc entrainer chaque jour par les autres dans des promenades nocturnes. C’est ainsi que j’ai rencontré Christian un gars bien, habitant le quartier de Bagadadji où nous nous rendions souvent la nuit.
Je suis tombée enceinte pour la première fois. Mes amies m’entrainèrent pour un avortement mal fait et je me retrouvai à l’hôpital avec des frais médicaux déduits de mon salaire.
Apres cet épisode malheureux, je décidai d’aller vivre au quartier Bamako Coura avec une copine. Cette dernière fait la lessive pour les gens et c’est ce travail que je fais jusqu’à aujourd’hui.
Je gagne bien ma vie mais je suis tout le temps fatiguée et tous mes repas sont à ma propre charge. Et on est tout le temps malade à cause de l’effort physique et surtout avec le froid qui s’annonce ce n’est pas toujours facile de mettre les mains dans l’eau froide. Or si tu ne gagnes rien, alors tu ne manges rien !
Aujourd’hui j’ai une petite fille que j’ai eu avec un vendeur de pochettes de téléphone qui promet de m’épouser mais pour le moment on est en concubinage.
Je n’ai pas l’intention de retourner au village où mes parents ont été humiliés et déçus à cause de mon comportement. »
Même si le manque de qualification et de formation sont des raisons qui les pénalisent, les aides ménagères ne sont pas moins maliennes que les autres travailleurs du Mali. Elles doivent donc bénéficier de leurs droits en tant que travailleur mais aussi en tant que citoyen tous simplement.
Mariam Kouyaté pour Nouvelles du Mali